21 déc 2020 - 14:35
Par Daniel Coulibaly
"Sur 100 milliards de dollars que génère la filière mondiale du cacao, les pays producteurs n'ont que -6%". C’est une précision de l’ambassadeur Aly Touré, représentant permanent auprès des organisations internationales de produits de base et président du conseil international du cacao de l'organisation internationale du Cacao (ICCO), depuis septembre 2020. Il s’exprimait à l’occasion d’une conférence de presse au siège de l’organisation à Abidjan, la semaine dernière.
Point besoin d’être un brillant économiste pour comprendre que les pays producteurs (22 au total) sont lésés dans la commercialisation du cacao. Or, c’est grâce à eux que cette matière première ne manque pas aux grandes firmes du cacao et chocolat à travers le monde.
Malgré les millions de tonnes de cacao produits chaque année et vendues, les pays producteurs et surtout les paysans ont bien du mal à profiter d’un produit qui est chaque année encore plus prisé. On évaluait ainsi en 2019 à 4 millions de tonnes, la consommation de chocolat dans le monde.
« C’est insoutenable. C’est presqu’un scandale », s’indigne M. Touré. C’est difficile de comprendre que des pauvres planteurs de cacao dans les pays producteurs ne puissent pas jouir du fruit de leur labeur ; et vivent pour plupart dans la pauvreté, pendant que les grandes industries du chocolat se font la part belle.
En Côte d’Ivoire, le producteur du cacao a du mal à joindre les deux bouts, depuis des années. Le prix du cacao est instable. Tantôt c’est 825 FCFA/tonne, tantôt moins. Actuellement le prix est à 1000 FCFA. Et cela l’a été avant la présidentielle du 31 octobre 2020, où le président ivoirien Alassane Ouattara a indiqué qu’il correspondait à la prime négociée depuis 2019 par le gouvernement avec les multinationales pour améliorer les revenus des planteurs.
« Nous avons décidé d’augmenter le prix de 825 à 1 000 francs CFA », avait-il déclaré à l’ouverture des Journées nationales du cacao et du chocolat, à Yamoussoukro en octobre dernier. Au ce sujet, le Ghana (20% de la production mondiale) et la Côte d’Ivoire (40%) avaient mené une bataille contre les multinationales du cacao et du chocolat pour la prime de 400 dollars par tonne (soit 224 francs CFA par kilo) correspondant au « différentiel de revenu décent » (DRD).
C’est pourquoi, la Côte d’Ivoire qui assure la présidence du conseil de l’ICC) entend œuvrer pour l‘amélioration de la vie des planteurs des pays producteurs membres. Pour ce faire, Aly Touré voudrait proposer un groupe de travail dans ce sens durant son mandat d’une année.
“Je souhaiterais proposer aux membres de l’ICCO un groupe de travail sur les prix internationaux, regroupant des membres de l’ICCO, des opérateurs du secteur privé les plus influents. Si nous voulons que la filière cacao soit durable, il est important que tous les membres de la chaîne de valeurs ; c'est-à-dire du plus petit producteur puisse y trouver son compte ; mais il s'avère que plus on avance ; plus les producteurs ne sont pas satisfaits des prix sur les marchés internationaux. Il y a des mécanismes qui sont mis en place par certains membres avec l'accord historique entre la Côte d'Ivoire et le Ghana. L'ICCO voudrait jouer sa part sur cette question pour voir dans quelle mesure, les producteurs pourraient être mieux rémunérés. C'est la première fois dans cette organisation, le revenu du producteur devient une préoccupation principale dans un seul accord stratégique. Je compte exercer ma présidence sur ce point précis et les discussions avancent bien", a annoncé Aly Touré.
Cependant, les Etats producteurs, malgré toute cette bonne volonté affichée doivent intégrer le fait que la solution pour leurs économies passe par la transformation.
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