07 juin 2021 - 16:08
Par Gnamien Attoubré
Au cours des années 1960, la quasi-totalité des anciennes colonies françaises ont accédé à leur indépendance. Au même moment, l’ancienne puissance colonisatrice a signé des accords avec ces pays afin de conserver une certaine hégémonie sur ces derniers et protéger ses intérêts. Parallèlement un système opaque et informel de relation directe entre la France et les chefs d’Etat africain a été mis en place. Il s’agit de la « Francafrique ». Ce système informel a renforcé la « diplomatie par le haut ».
La diplomatie par le haut ou l’art de tenir la tête pour tenir le bas
Depuis les indépendances, les questions de bonne gouvernance et d’édition des comptes mais aussi l’exigence de la séparation des pouvoirs restent des problématiques entières. Ainsi, les chefs d’Etat concentrent entre leurs mains tous les pouvoirs mais aussi toutes les décisions.
Ayant compris cette dynamique, la France a mis en place une politique qui consiste à rester proche des chefs d’Etat des ex-colonies de sorte à ce que jamais, ses intérêts ne soient remis en cause.
Dans cette dynamique, elle ne trouve souvent pas de gêne à soutenir des régimes aux forts relents antidémocratique. En somme, à la place de l’exigence démocratique, elle opte généralement pour la Realpolitik. Ainsi, des élections minées d’irrégularités sont souvent validées par la France sans oublier des coups d’Etat qu’elle cautionne. Le dernier en date reste celui au Tchad. Ce comportement ambigu renforce le désamour entre une grande partie de la jeunesse africaine et ce pays.
Le fossé entre dirigeants et population qui dégrade les relations France-Afrique
Si dans le passé la gestion de l’information était opaque et la contestation moins visible du fait du contrôle exercé par les pouvoirs en place dans les anciennes colonies, la situation s’est sensiblement améliorée. La démocratisation d’internet, des médias ainsi que l’action de certains intellectuels ont permis d’ouvrir les débats sur les rapports entre la France les pays de l’Afrique. Progressivement, une masse critique s’est formée autour de grandes questions telles que les accords militaires ou encore le Franc CFA.
Les effets de cette prise de conscience associés au mécontentement lié à la mauvaise gouvernance ont creusé le fossé entre les pouvoirs, généralement soutenu par la France et les populations qui sont dans une double revendication. Elles réclament d’une part de meilleures conditions de vie mais aussi une indépendance totale. Dans ces conditions, les critiques formulées contre les politiques touchent nécessairement la France. Car nombre d’africains pensent à tord ou à raison que c’est ce pays qui impose les dirigeants et qui dictent les politiques publiques.
De la nécessité pour la France de prendre en compte les aspirations de la jeunesse
La grogne monte, les discours durs contre la France trouvent de l’écho favorable auprès de cette jeunesse qui veut couper le cordon ombilical avec la France. Comme évoqué plus haut, le contexte a vraiment changé et personne ne peut empêcher ou étouffer la contestation.
La France doit en tenir compte si elle veut conserver son influence dans son « pré-carré ». En effet, dans le contexte actuel, plusieurs pays comme l’Allemagne, la Russie, la Chine prennent véritablement pieds en Afrique, les africains rêvent de nouvelles relations basées sur le respect mutuel et des partenariats gagnant-gagnant.
Seulement, l’ancienne puissance coloniale semble plus jouer sur le passé que se projeter dans le futur en prenant en compte les aspirations réelles des jeunes générations.
Les pays d’Afrique francophone ne peuvent pas se passer de la coopération avec la France compte tenu du poids de l’histoire mais une redynamisation des relations s’impose.
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